« Premier citoyen, ce n’est pas une casquette, c’est un tatouage ! »

Intronisé premier citoyen de la République et Canton de Neuchâtel le 25 mai 2021 par le Grand Conseil, le libéral-radical Quentin Di Meo a transmis sa clochette à la Verte Clarence Chollet le 24 mai 2022. Retour sur une année de présidence riche et intense.

Président du Grand Conseil jusqu’à la semaine prochaine, Quentin Di Meo se réjouit de retrouver sa place de député. (SP)

Président du Grand Conseil neuchâtelois, le libéral-radical Quentin Di Meo l’aura été sans relâche pendant une année. Au moment d’en tirer le bilan avant de retrouver sa place de député dans les rangs du Parlement dès la fin de la prochaine session, le 24 mai, le jeune homme de 28 ans s’estime marqué à vie par cette fonction. A quelques jours de transmettre sa clochette à la Verte Clarence Chollet, Quentin Di Meo s'est livré à Libertés neuchâteloises.

Quentin Di Meo, vous réjouissez-vous de retrouver votre place de député ?

Oui ! Je suis extrêmement reconnaissant du soutien de mon parti qui, en m’accordant sa confiance, m’a offert une si belle opportunité, mais, en cinq ans, je n’ai finalement siégé qu’une seule année en tant que député avant d’occuper une place au Bureau du Grand Conseil pendant trois ans puis d’en tenir la présidence durant cette dernière année. Je me réjouis de redécouvrir l’hémicycle avec un bagage supplémentaire et de voir un autre député libéral-radical entrer au Bureau.

Actuellement, les groupes libéral-radical et VertPop occupent chacun deux sièges du Bureau du Grand Conseil, et le cinquième est tenu par un représentant du groupe socialiste. Cette répartition sera donc renouvelée ?

Le groupe libéral-radical proposera effectivement que cette place revienne à Sophie Rohrer, l’une de ses membres. La nouvelle configuration du Bureau ne devrait pas poser de problème, mais, même si cela n’arrive jamais, il est possible que le Grand Conseil en décide autrement. Si l’on a été un mauvais président, qui sait !

Avez-vous été un mauvais président ?

Non, je ne pense pas (rires) ! Autour de moi, il se dit que j’ai été un président juste et respectueux de la loi, des procédures et des protocoles, bien que peut-être parfois trop. J’ai tenté de faire au mieux.

« La ponctualité a été mon dada. J’ai certainement été un président expéditif lorsque les sujets ne nécessitaient pas de grands débats. »

A quoi vous êtes-vous particulièrement attaché dans l’exercice de votre fonction ?

La ponctualité a été mon dada. C’est important, car chaque minute perdue engendre du retard dans les dossiers et nécessite de repousser des objets à une autre échéance. J’ai certainement été un président expéditif lorsque les sujets ne nécessitaient pas de grands débats. Le temps passe très vite durant les séances, du moins lorsque l’on occupe la place de président, j’ai donc essayé de développer quelques tactiques pour éviter les pauses prolongées : il m’est par exemple souvent arrivé de raboter de quelques minutes les suspensions de séances pour que la pause effective ne dépasse pas 30 minutes, en comptant le retard des députés lorsqu’il s’agit de revenir dans l’hémicycle.

Est-ce que présider la première année de la législature a représenté un défi supplémentaire ?

En raison du taux record de renouvellement des élus, la plupart siégeaient en effet pour la première fois et ont dû s’adapter et s’acclimater au processus parlementaire. Au début, le silence et une attention extrême régnaient dans l’hémicycle. Au fil des sessions, les membres du Grand Conseil sont davantage à l’aise, prennent spontanément la parole et, il faut bien l’avouer, prolongent quelque peu les pauses. C’est donc assez amusant, et surtout bien heureux, de voir cette évolution. C’est un élément que les prochaines présidentes ne vivront pas.

Quel a été le moment le plus intense ?

Sans hésitation, ma prise de fonction, le 25 mai 2021. Quand le président a terminé son discours d’intronisation, il s’assied sur le fauteuil à double coussins et est regardé par tout le canton. C’est un moment très particulier. Ce d’autant que, contrairement à ma successeure qui présidera la deuxième année de la législature, j’ai ensuite parlé à l’hémicycle pendant de longues minutes afin de mettre en place les commissions et de présenter, particulièrement aux nouveaux députés, de nombreux aspects liés au fonctionnement du Parlement. C’était assez solennel et surtout très intense, car la pression retombe un peu.

Avez-vous vécu des moments de doutes lors de votre année de présidence du Parlement cantonal ?

Au cours de la deuxième session de la législature, parce que le vote du Grand Conseil était parfaitement égal à 50 voix contre 50, j’ai dû trancher sur une proposition de commission. C’est un moment qui nécessite d’être bien accroché à son siège, car la voie choisie peut avoir des conséquences non négligeables : faut-il, dans ces moments-là, trancher selon la direction indiquée par la majorité de son groupe ? Suivre sa propre opinion ? Valider celle du Conseil d’Etat ? En l’occurrence, il s’agissait d’accepter ou non une demande d’étude, mais dans d’autres cas, les enjeux peuvent avoir un véritable impact pour le canton : le budget, par exemple !

La responsabilité du premier citoyen de la République et Canton de Neuchâtel n’est donc pas anodine, cela vous a-t-il parfois pesé ?

La tâche est lourde, c’est vrai, et elle est permanente. Tous les jours, rencontres, téléphones, lettres et courriels viennent nous rappeler à quel point cette fonction est prenante. Même la famille et les amis se plaisent à en parler ! Il y a aussi les sollicitations par les associations, pour une assemblée, un concours ou une manifestation dans notre canton. Il faut préparer quelques mots à prononcer. C’est vraiment une expérience unique. Ce n’est pas une simple casquette, c’est un tatouage qui marque à vie.

Quel enseignement tirez-vous de cette expérience ?

Que notre canton est d’une richesse insoupçonnée et que chacun peut y trouver sa place. On ne peut être que meilleur politicien après avoir été président du Grand Conseil, parce qu’on a rencontré, découvert et vécu de l’intérieur la diversité de notre république.

Au soir du 24 mai, l’agenda politique de Quentin Di Meo ne risque d’ailleurs pas de s’alléger. En plus de son mandat de député, de commissaire dans les domaines des finances, des déchets et sites pollués, et du chapitre climat et énergie, de celui de conseiller général à Val-de-Travers, de son rôle de vice-président du PLRN et de ses activités professionnelles à la Chambre du commerce et de l’industrie (CNCI), le jeune homme a intégré plusieurs associations. 

Propos recueillis par Anthea Estoppey, journaliste, rédactrice en chef de Libertés neuchâteloises.