« Allô Washington ? »

Pour ceux qui croyaient que la Suisse pouvait vivre hors du tumulte du monde, c’est raté. Pour ceux qui pensaient qu’elle pouvait remplacer l’Union européenne avec d’autres marchés, aussi.

Dans la frénésie de ses cent premiers jours, Donald Trump a mis un coup de massue au commerce mondial et a menacé la Suisse d’une taxation particulièrement élevée, 31% de taxes douanières, un des taux les plus élevés dans le monde, calculés par une méthode qui confine à l’absurde.

Heureusement, avec le nouveau – qui est aussi l’ancien – président américain, beaucoup de choses semblent provisoires et les grandes annonces d’aujourd’hui ne sont parfois, le lendemain, plus que des idées en l’air. Aussitôt annoncées, aussitôt gelées pour 3 mois, les nouvelles taxes – mais avec tout de même +10 points qui touchent de plein fouet les branches concernées alors que le taux moyen de taxation des produits suisses était de 2,2%, passer à 12,2% n’est pas sans impact ! Ce demi-répit permet de chercher à discuter, voire à négocier.

Sous la coupole fédérale, les esprits se sont échauffés.

Les lignes de téléphone aussi. Direction Washington. Il fallait établir des contacts au plus haut niveau. Ceux qu’il n’avait pas encore été possible de faire en début de mandat avec une équipe toute nouvelle et focalisée sur l’intérieur. Après moultes démarches, un téléphone entre présidents était enfin programmé. Un vrai tour de force qui a permis de passer des messages-clé :

  • la Suisse accorde déjà des taxes nulles aux USA sur 99% de leurs produits – difficile d’aller plus bas !
  • Avec ses entreprises, elle représente le 6e investisseur direct dans les cinquante États américains – pas mal pour un pays de 9 millions d’habitants ! Et cela représente pas moins de 400’000 emplois souvent très qualifiés et bien payés.

Pour réindustrialiser les États-Unis, la Suisse est un partenaire solide, ce d’autant qu’elle s’y connait en formation professionnelle dans un pays qui a cruellement perdu son savoir-faire industriel.

La Suisse dans les 15 pays prioritaires

Grâce aux efforts diplomatiques menés par téléphone, sur place à Washington, mais aussi sur le parvis de la place St-Pierre, la Suisse se trouve désormais dans une liste de quinze pays avec lesquels mener une discussion prioritaire. Un bon point qu’on doit à la stratégie calme et volontaire du Conseil fédéral, heureusement bien loin des agitations de la gauche qui demande de hurler et de mettre la Suisse au centre de la cible !
Mais il est trop tôt pour crier victoire face aux pressions de la Maison Blanche. Difficile de savoir comment se termineront les tractations. Les contacts se poursuivront. Et les parlementaires font leur part, car même si le Congrès semble plus occupé actuellement par les questions de fiscalité interne, passer des messages dans cet important contre-pouvoir peut aussi avoir son importance.

L'importance de l'association parlementaire Suisse-USA

L’Association parlementaire Suisse-USA que je préside depuis deux ans sert à cela. Elle a été fondée après la crise des fonds en déshérence par Peter Brinner (CE, PLR, SH) qui l’a présidée une douzaine d’années. Puis Christa Markwalder (CN, PLR, BE) a pris le relais pour 12 nouvelles années.

Les PLR font leur part. L’association a reçu des membres du Congrès à Berne en mars. Elle en rencontrera d’autres cet été à Genève.
Et elle prévoit de se déplacer aux USA cet automne.

La Suisse a 3 grands partenaires commerciaux : l’UE (45% des exportations), les USA (15%) et la Chine (10%). Le Conseil fédéral a
raison de chercher à stabiliser et à renouveler nos relations avec les trois. Et avec d’autres économies fortes ou montantes comme l’Inde, le Japon, la Malaisie, la Thaïlande ou d’autres pays d’Asie ou d’Amérique du Sud notamment. Il en va de notre capacité à exporter, donc de notre prospérité.

Les intérêts de la Suisse se défendent à Berne mais aussi loin de nos frontières.

Damien Cottier, président du groupe PLR des Chambres fédérales